Saintélyon 2015
Que dire de la Saintelyon 2015, une fois que l’on s’est plaints de l’absence de Pepsi aux ravitos, remplacé par le vilain Pepsi Max ? Certains voyagent dans le bon train de la vie, celui qui n’est perturbé que par les coupures publicitaires et les files d’attentes aux aéroports. Nous autres cueillons les instants fragiles, collectionnons des souvenirs arrachés avec nos propres mains. Un lever de lune rouge à l’est, au dernier croissant, dans le dos un chapelet de frontales qui s’étire sur l’échine de la terre de ses aïeux, à son côté un collègue et ami, au loin, les lumières de la ville de son enfance. Mais c’est à l’intérieur que je regarde. Je pense à toi qui né comprends pas pourquoi je porte ce dossard chasuble. Tu t’imagines que seule la lenteur permet d’extraire le présent, qu’un esprit de compétition m’animé, qu’en vérité nous sommes différents. Plus loin, j’entends la voix de ceux qui m’envient d’être “né pour courir”, de pouvoir expédier soixante-douze kilomètres en chaussures minimalistes sans m’être infligé la moindre sortie longue dans les trois mois qui ont précédé l’épreuve, de me classer dans les premiers six pour cent en affichant deux maigres entraînements par semaine sur une butte que personne n’ose plus appeler montagne. À vous, si seulement je vous disais tout, vous vous lèveriez et partiriez courir à travers les continents.
Revenons à ce départ, presque sous l’arche, où le chant de la foule côtoie le silence de la nuit. Revenons à la légèreté de nos pas qui nous emmènent, déjà, sur les hauts de Sorbiers ou du Signal. Si l’absence de neige et verglas né m’avantage pas, je me plais à courir sur cet improbable velours de terre sèche déserté par les cailloux — et les pavés. Bientôt, Damien m’annonce qu’il souffre de crampes, qu’il né peut avaler le comprimé de Sporténine que je lui tends. En vue de Soucieu-en-Jarrest, où il s’arrêtera, je suis seul. Il reste vingt kilomètres. À Sainte-Catherine, la nuit est encore bien installée ; ici, elle organise sa retraite. Je rassemble mes pensées avant de dévaler la montée (sic) du Grapillon, pourrais verser une larme de bonheur dans les eaux de la Saôné que le jour naissant a déjà inondé d’un bleu intense. À plus de seize kilomètres à l’heure, je pénètre dans la halle Tony Garnier, autrefois surnommé Palais de l’industrie, comme on entre dans la gueule d’un monstre. La ligne d’arrivée franchie, je suis projeté dans un labyrinthe de barrières de sécurité, mais retrouve mon père, Sarah, puis Damien. En quittant ce que les espaces parcourus conviendront d’appeler réduit, brusquement rattrapé par la progression du Soleil, il me revient cette phrase déposée par Erri de Luca dans Le jour avant le bonheur : “Dehors, c’était un jour brillant, un jour de mai tombé dans le tas de décembre.”
Classement : 296e sur 5323 arrivants, 6020 partants et 6500 inscrits.
Pourcentage de la cote de Benoît Cori en 2015 et 2013 : 68,19 et 69,91 %, ce qui à performances égales aurait donné 7 h 20 min 6 s en 2015.
Pourcentage du temps du plus rapide coureur solo [Nom(s)] de chaque section (entre parenthèses le pourcentage moyen pour les mille premiers coureurs) :
- Saint-Étienne — Saint-Christo-en-Jarez 138 (135) % [Cori/David],
- Saint-Christo-en-Jarez — Sainte-Catherine 140 (144) % [Cori/David],
- Sainte-Catherine — Saint-Genoux 154 (160) % [Cori],
- Saint-Genoux — Soucieu-en-Jarrest 161 (165) % [Martin],
- Soucieu-en-Jarrest — Chaponost 168 (166) % [Martin],
- Chaponost — Lyon 136 (157) % [Cori/Martin].
Saintélyon 2015 [13 min] par Rhone-Alpes
Saintélyon 2015 par Rhone-Alpes