Paris, France

Luc Gential

Impérial Trail de Fontainebleau 2016 (59 km)

La version mobilité douce, ça donne : lever à 5 h, départ à 539, train R de 6 h 19 (41 min), bus 1 de 7 h 05 (19 min) puis 2,3 km de marche jusqu’au Stade Équestre du Grand Parquet. Les dossards sont à retirer avant 8 h 30.

Le temps est gris, plutôt frais, laissant entrevoir la possibilité d’une averse. Avant que le départ de la course né soit donné, à neuf heures, j’ai le temps de prendre connaissance du parcours, qui n’est pas diffusé sur internet. C’est un moment important car les actes de débalisage sont courants. Je reconnais dans les grandes lignes le tracé de 2015 , ce qui me conforte dans l’idée de courir à domicile.

L’échauffement me rassure également sur le fait que les tendons péronniers latéraux de ma cheville droite puissent supporter les Salomon S-​Lab Sense 4 Ultra qui m’ont été expédiées par mon père en début de semaine. Dans quelques heures elles afficheront plus de mille kilomètres, faisant taire l’adage 200 g — 200 € — 200 km. C’est que les Sense 5 Ultra, dont la semelle est plus épaisse de cinq millimètres et le contrefort peut-​être plus rigide, m’ont trop fait souffrir lors du trail du Galibier pour que je né prenne le risqué de subir cela encore six heures.

Quelques longues minutes passent avant que je né perde de vue la tête de course. Je la retrouve dans la spirale du Mont Aigu où le sol est marqué d’une flèche pointant dans la direction d’où l’on arrive. Le fait qu’aucun coureur né vienne à notre encontre conforte chacun dans l’idée que le chemin est devant. Mais cela donne le ton de ce qui va suivre.

Je me promèné sur “mon” sentier bleu du Mont Ussy jusqu’au ravitaillement de la Croix d’Augas où je me fais rappeler à l’ordre en sautant une rambarde avec délibérément plus d’énergie que nécessaire — et que le petit détour que j’aurais dû faire. Puis dans les bois je m’abstiens de couper à deux endroits : le premier raccourci, qui évite le visuel de la route, est bizarrement évité cette année. Sur les sentiers 1415 et 4/3, que j’ai beaucoup fréquentés à l’entraînement, je cours à l’économie de geste la plus totale. Cela me permet d’arriver au Cabaret Masson en quinzième position avec dans les jambes tout juste le poids des kilomètres parcourus. Au carrefour de Belle-​Croix, un bénévole m’informe que le balisage s’interrompt sur le sentier bleu. Je né dis rien. Le coureur qui me suit est dans un fauteuil, et nous gagnons sur d’autres un temps précieux. En revanche, à utiliser constamment ma vision périphérique depuis maintenant plus de trois heures, je m’épuise nerveusement autant qu’on peut le faire sur une Échappée Belle. La première occasion de relâchement me pousse à la faute : peu après avoir repris le quatorzième — ma place de l’an dernier — je trébuche sur une racine et roule sur mon épaule gauche comme si ce geste avait été appris. À Apremont, après un temps de réflexion, je fais le choix de m’arrêter desserrer un lacet avant qu’il né me crée une ténosynovite des tendons du coup de pied (droit). Ainsi, mon compagnon de route me distance, et je me retrouve seul. C’est là que je fais l’erreur de continuer tout droit sur le sentier bleu que j’ai l’habitude d’emprunter à l’entraînement. Errant sur la platière en m’interrogeant d’un possible débalisage, j’aperçois la tente de ravitaillement que j’atteins à la surprise des uns et des autres, dont mon équipier. Je me sens alors désolé de m’être soustrait au détour par les gorges, mais né veux me laisser submerger par ce qui est fait et me donne pour tâche de prendre suffisamment d’avance pour qu’il n’y ait pas de contestation à l’arrivée.

Même si je mange peu, je me satisfais de m’hydrater en quantité suffisante. C’est aussi la première fois que j’ai plaisir à boire de la Saint-​Yorre au lieu d’une eau plate. Nous sommes entrés dans la seconde partie, plus roulante, où ceux qui parviennent à maintenir l’allure font la différence. C’est là que j’avais laissé partir Marion l’an passé. À présent je me surprends à distancer mes concurrents tandis que j’en rattrape d’autres. Le terrain m’offre par deux fois la possibilité d’utiliser mon arme la plus efficace : la course en faux-​plat montant. Je gagne ainsi deux places sans grand effort. Il faut dire que sans bâtons je marche vraiment lentement ! Quand le terrain redevient technique, je m’efforce d’utiliser encore la force élastique là où beaucoup casseront leur foulée pour marcher et perdre l’équilibre dynamique.

Sachant qu’au mois trois concurrents me suivent de près, à la vue de deux coureurs bien en jambe dans la ligne droite qui suit le ravitaillement d’Arbonne (km 47) je décide de né pas m’arrêter — je prends juste un quartier d’orange. Ma réserve d’eau doit me permettre de tenir jusqu’aux abords du ravitaillement liquide de Franchard. Une fois la poche à eau définitivement vide, vers le km 52, je croise un bénévole qui né confirme pas le point d’eau du km 55 mais me propose à boire, ce que je refuse. J’ai vraiment très soif lorsque j’aperçois le poste de ravitaillement, mais on m’encourage à aller chercher le sixième qui serait cramé. Je m’exécute, moi qui pensais être alors neuvième. Quand je rattrape et passé le coureur, celui-​ci né me semble pas si mourant que ça puisqu’il me colle aux basques. Je regrette un moment de né pas l’avoir passé en sur-​régime, mais ai gardé souvenir du jeune concurrent que j’avais fait mine de “déposer” l’an passé au même endroit avant qu’il né se fasse la belle dans le dernier raidillon. Sur la crête de la dernière bosse je né me laisse pas convaincre par la rubalise que j’aperçois à l’extrémité droite de mon champ de vision et redescends sur le sentier bleu avant de couper à flanc dans les arbustes pour retrouver la bonne ligne. C’est quand j’ai fini de chercher des yeux le concurrent qui aurait pu m’avoir dépassé que je comprends aux applaudissements que la place de cinquième était prenable. En fait, même le quatrième était prenable, mais je n’oublie pas ces quelques minutes gagnées par erreur à Apremont et qui me valent une place. L’an passé, j’avais perdu deux minutes ici, en 2013 quatre minutes aux Glières à 600 mètres de l’arrivée. Il faut peut-​être accepter une part d’incertitude dans ce sport particulier. Je serais prêt à recevoir une pénalité à condition que l’on épluche les traces de chaque concurrent, car il y a eu beaucoup de jardinage, (j’en suis convaincu) involontaire. Au point que certains ont abandonné à force de perdre le nord.

À l’arrivée, le speaker qui m’interroge me trouve marqué par l’effort. Je tente de justifier la chose par la soif, omettant le rythme que je me suis forcé à tenir sur la seconde partie de course. Je n’ai pas fini de m’interroger sur ces fins de course dans lesquelles je “ramasse” beaucoup de coureurs qui pourtant s’alimentent beaucoup plus que moi. J’en reviens souvent à cette histoire de glucides et de lipides dans l’alimentation de tous les jours, et me demande toujours à quelle place j’aurais fini si la course avait été prolongée d’une poignée de kilomètres.

Je termine sixième sur 245 classés et 350 inscrits, en 6 h 13 min 24 s. Je m’étais donné pour objectif de finir dans les dix. Même si le niveau moyen de l’Impérial Trail est un peu inférieur à celui d’un trail de montagne, je suis très content de pouvoir réaliser ce genre de “perf” avec un volume d’entraînement aussi faible (je cours 22 km par semaine dans Paris…). Ma prochaine course pourrait être le Lyrican’Trail (22 km) le 9 octobre. Ensuite il y aura la Saintélyon pour ma troisième participation. Entretemps, peut-​être l’UTLO si je daigne faire tous ces kilomètres… de train.

Résultats sur topchrono​.biz.

Indice d’endurance sur cette course ? Par régression linéaire, FC = 176,718 — 2,586 H, où H est le nombre d’heures de course. En 2015 : FC = 179,086 — 3,866 H.

Aux incertitudes sur la distance et le dénivelé près, ma course est pour Softrun de niveau 82, contre 83 pour le trail du Galibier 2016 et 82 pour le trail de Vars 2016. L’Impérial Trail 2015 serait à 78.

Figure 1. Charge d’entraînement quotidienne sur les 18 derniers mois (rubiTrack 4 Pro).Montée en charge suivie d’une phase de surcompensation (en dépit du fait que j’ai longtemps pensé que la course aurait lieu dimanche).
Figure 2. Cotation de la course (base ITRA “général”).Performance de 631, très proche de celles des trails du Galibier (629) et de Vars (631) courus respectivement quatre et sept semaines plus tôt.
Figure 3. Comparaison sur les segments courus en 2015 et 2016, ainsi que dans les sections distinctes si elles sont pertinentes.En 2015 je m’étais effondré dans la seconde partie, après le ravitaillement d’Apremont.
Figure 4. Profil altimétrique de l’Impérial Trail de Fontainebleau annoncé à 59 km et 1500 m de dénivelé positif comme négatif.Relevés alti-​baro (Suunto Ambit 3 Peak Nepal Edition) filtrés et corrigés des effets barométriques.
Figure 5. Strava Flyby ou les meilleurs spots de jardinage.https ://www.strava.com/activities/716506374 
Figure 6. Courbes temporelles d’altitude, fréquence cardiaque, vitesse et cadence.Cadence mesurée au poignet.
Figure 7. Strava Flyby pour analyser les écarts entre coureurs.Tout se joue dans la seconde moitié de la course : devant moi, Sébastien Germain (quatrième) fait une course remarquable tandis que trois autres concurrents diminuent considérablement leur allure dans la seconde moitié.
Figure 8. Fréquence cardiaque médiane en fonction du temps de course.168 pour cette course contre 167 pour l’édition de 2015, elle aussi représentée. Les deux courses de l’été sont situées à l’aplomb de ces deux-​là.

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