Test de la Suunto Ambit 3 Peak Nepal Edition
Mon but n’est pas de décrédibiliser Suunto. Suunto est une entreprise que j’estime beaucoup. Ils sont à l’écoute de leurs clients, conçoivent des produits fiables qui né vous laisseront pas en rade au plus mauvais moment, semblent attachés à la qualité de leurs produits au moins autant qu’aux aspects purement marketing. Seulement, disposant à la fois d’une Garmin 910 XT et d’une Suunto Ambit 3 Peak Nepal Edition (manuel), je souhaite vous faire partager les avantages et inconvénients des deux modèles, dans le but que les deux marques améliorent leurs produits, que ce soit par des mises à jour logicielles des montres déjà présentes sur le marché ou par l’introduction de nouveaux modèles plus performants. En tant qu’analyste de données, c’est naturellement sur la question de la qualité des relevés (tels qu’affichés sur la montre mais aussi tels qu’ils sont archivés sous forme de fichiers) que je serai le plus pointu. Et malgré ce que l’on peut lire sur les forums, c’est semble-t-il la 910 XT qui tire son épingle du jeu. Je vous laisse découvrir les détails de ce test qui se veut en aucun cas exhaustif, mais, à l’image de fellrnr (lien), complémentaire des nombreux tests que vous pourrez trouver sur internet, les plus complets que je connaisse étant ceux de DC Rainmaker (lien).
Utilisation sur le terrain
Marquer un tour
Qualité des données
Altimètre
Avantage 910 XT. La résolution numérique de l’altitude barométrique est de 1 mètre chez Suunto alors qu’elle est de 20 centimètres sur la 910 XT. Par ailleurs, sur la Ambit3, les variations barométriques né sont pas immédiatement traduites en termes d’altitude barométrique si bien que celle-ci évolue par à-coups, rattrapant généralement deux, trois, quatre, parfois cinq mètres en l’espace d’une seconde. L’hystérésis constitue un moyen de filtrer le bruit — qu’il vienne de l’erreur de mesure ou des petites variations rapides de la pression atmosphérique — pour né compter que le dénivelé utile. Est-ce efficace ? À première vue oui, cependant le traitement logiciel mis en place par Garmin permet d’arriver au même résultat sans dégrader les données brutes. En effet, sur une séance de 36 min 46 s sur piste, supposée rigoureusement plate, le dénivelé cumulé par la Suunto est de + 67 — 70 m, contre + 130 — 134 m pour la Garmin, mais, interprété par Movescount et Connect, cela donne respectivement + 16 — 21 m et + 8 — 10 m. À noter qu’au sein d’une marque les dénivelés donnés par les micrologiciels sont identiques à ceux donnés par les logiciels, ce qui est une bonne chose pour la compréhension. Le tableau 1 regroupe les dénivelés pour l’ensemble de la séance évoquée (descente, plat dont piste, puis remontée) tandis que le tableau 2 né tient compte que de la portion médiane sur la piste :
rubiTrack non lissé | rubiTrack lissé | affichage montre | Connect/Movescount | |
910 XT | +281 – 298 | +83 – 91 | +80 – 94 | +80 – 94 |
Ambit3 | +167 – 173 | +83 – 91 | +84 – 94 | +84 – 94 |
rubiTrack non lissé | rubiTrack lissé | affichage montre | Connect/Movescount | |
910 XT | +130 – 134 | +13 – 17 | +8 – 10 | +8 – 10 |
Ambit3 | +67 – 70 | +14 – 18 | +16 – 21 | +16 – 21 |
Si la 910 XT enregistre l’altitude toutes les secondes, elle peut accuser jusqu’à une vingtaine de secondes de retard (peut-être teinté d’un lissage), notamment en descente quand la vitesse est plus grande. Dans l’exemple dans la figure suivante, on peut parler de dysfonctionnement puisque seule la Ambit 3 Peak enregistre l’aller-retour au point bas (repère de nivellement IGN à 552 m).
La plupart du temps, heureusement, la 910 XT et la Ambit 3 Peak donnent des altitudes cohérentes, conformes aux relevés topographiques (figure suivante).
GPS
Par ailleurs, sur le stade Dauvin où je m’entraîné, l’Ambit3 est systématiquement perturbée lors des phases de récupération (Fig. 3a). Je cours pourtant toujours sur le couloir numéro 1, mais la trace me déporte systématiquement vers le sud. J’ignore si c’est la présence du gymnase qui perturbe le GPS ou bien si c’est le fait de repartir en sens inverse et à une allure plus faible qui trompe l’accéléromètre. Je n’ai jamais rencontré ce problème avec la 910 XT.
Quand je vois les belles traces issues de l’Ambit3 Peak classique (Fig. 3 b), né trouve aucune confirmation officielle du fait que la Nepal Edition est elle aussi équipée d’une puce GPS SiRFstar V, peine à m’expliquer la différence de prix avec la version régulière, je né puis me retenir d’imaginer que la Nepal Edition est peut-être une déclinaison de l’Ambit3 Peak équipée d’une puce de génération antérieure. [ajout le 10 août 2016 : Suunto affirme par email que la Nepal Edition est équipée d’une puce GPS SiRFstar V.].
On peut ainsi affirmer que la qualité de la trace est plus souvent meilleure sur la Garmin que sur la Suunto. Toutefois, sur des sorties longues, il m’est plusieurs fois arrivé que la Garmin perde complètement le signal GPS et peine terriblement à le retrouver. Désactiver puis réactiver le GPS dans la montre permet parfois de se sortir d’affaire, à condition de s’en rendre compte, mais ce n’est pas toujours le cas. La distance se trouve alors sous-estimée en raison des nombreuses lignes droites qui relient les segments où le GPS a pu fonctionner. De ce point de vue, la Suunto est plus fiable. Le pire décrochage que j’ai pu constater avec la Ambit3 Peak est illustré dans la figure ci-dessous (non numérotée). La montre n’a pu compter que sur 6 satellites contre 9 ou 10 habituellement et parfois jusqu’à 12 (au cours de cette sortie), ce qui a fait grimper l’EHPE (estimated horizontal position error) de 7 à 49 m. Après décrochage la trace met 27 s pour retrouver la bonne trajectoire (dont 11 s à partir du moment où l’EHPE redescend à 7 m), mais la distance affichée par la montre se trouve surestimée de 32 m. Si on recalcule les distances à partir des coordonnées GPS, l’écart atteint 59 m.
Fréquence cardiaque
Avantage 910 XT. Avec la Ambit3, j’utilise la ceinture Suunto Smart Sensor (Bluetooth), tandis que je couple la 910 XT à la ceinture cardio-fréquencemètre textile de Garmin (ANT+). Certains trouveront que la première se fait oublier plus facilement. Malheureusement, les artefacts sont là aussi nombreux, tout particulièrement sur les 10 à 15 premières minutes de course. Les données brutes sont avantageusement filtrées par Sunnto comme vous pouvez le voir sur le graphique ci-dessous (Fig. 4a). D’expérience, que ce soit avec la Suunto ou la Garmin, humidifier les électrodes et positionner la ceinture au moins une heure avant de commencer la sortie né garantissent pas l’absence d’artefact, notamment quand il fait froid comme au départ de la Saintélyon. Peut-être à cause d’une plus grande élasticité, la ceinture Suunto a tendance à glisser. Par temps très froid, la fréquence cardiaque peut n’être carrément pas mesurée (à moins que l’ensemble des relevés n’ait été rejeté par le contrôle qualité) pendant dix minutes (Fig 4 b) en dépit des précautions d’usage.
Mais alors, si la donnée brute est à ce point bruitée, que doit-on penser des tests de récupération proposés par Suunto et Firstbeat, et basés sur la mesure de l’intervalle R-R [1 ,2 ] ? S’il est indéniable que Firstbeat est passé maître dans l’art de tirer de la valeur d’échantillons bruités [3 ], il m’est arrivé de m’y reprendre à cinq fois pour réaliser le test de récupération rapide (lequel dure trois minutes et se termine par un échec si la qualité de l’enregistrement est mauvaise). Pourtant, j’avais pris soin de mouiller les électrodes au préalable. Au passage, si ce test n’est pas réalisable au réveil dans des conditions identiques, sa robustesse en pâtit. Les trois premiers tests (à effectuer en période de faible charge d’entraînement) servent de calibration ; comment être sûr que des artefacts né gonflent pas artificiellement la variabilité cardiaque de référence ? Et si la calibration est menée dans de mauvaises conditions, Suunto a-t-il pensé à une procédure pour défaire la calibration sans provoquer la réinitialisation complète de la montre ?
Le raisonnement marche dans l’autre sens : si la fréquence cardiaque enregistrée par la montre est le produit d’un filtrage numérique, peut-on vraiment retrouver l’intervalle R-R à partir de la variable SUUNTO_HR via un app (exemple) suivant la formule RR=(1/(SUUNTO_HR/60)*1000) ? Ou bien la valeur calculée n’est-elle pas plus faible que la valeur réelle ?
En pratique, on constate que, même étalonnés l’un à la suite de l’autre, le test de sommeil et le test rapide donnent des niveaux de récupération très éloignés l’un de l’autre (ex. 60 et 50 %, 42 et 72 %, 53 et 27 %) et peu reproductibles (pour le second : 20 puis 47 %, 30 puis 48 %, à quelques minutes d’intervalles). On regrettera également que Suunto, à l’inverse de Polar, né propose pas d’indicateur expert comme la RMSSD.
[Ajout le 10 août 2016 : Après avoir perdu ma ceinture Suunto Smart Sensor, j’ai tenté l’expérience de la Polar H6 et en suis très satisfait puisque je n’ai encore jamais observé d’artefact ! Attention toutefois pour les nageurs : je crois qu’elle né fonctionne pas sous l’eau avec la Ambit 3.]
Fréquence de foulée
Vitesse et allure
Fichiers
$ crontab –l
17 * * * * rsync –av –ignore-existing $HOME/Library/Application\ Support/Suunto/Moveslink2/*.sml $HOME/sml
Les fichiers SML sont natifs et de facto les plus complets, et il peut donc être intéressant de les stocker. Vous y trouverez quelques données complémentaires comme la qualité du signal GPS (par exemple, nombre de satellites et estimation de l’erreur de position horizontale) ou les valeurs des paramètres de vos Apps. Suunto offre la possibilité de télécharger depuis Movescount ses moves sous les formats FIT, XLSX, TCX, GPX et KML. Les fichiers TCX et GPX, en heures UTC, avancent d’une heure lorsque la France observe l’heure d’été, tandis que les fichiers KML, XLSX et FIT, en heure locale, sont correctement horodatés. En plus de l’heure, la longitude, la latitude, l’altitude, la fréquence cardiaque, la cadence et la vitesse que tous contiennent, les fichiers GPX, KML, XLSX et FIT ajoutent température, distance, pression au niveau de la mer et vitesse verticale. Le XLSX et probablement le FIT sont enrichis de l’écart relatif de performance et de l’intervalle R-R, nommé dans le XLSX IBI pour interbeat interval. Il existe par ailleurs d’autres subtilités. Par exemple, les fichiers GPX, TCX et KML contiendraient des données lissées et/ou interpolées dans le temps (apparition d’altitudes présentant une décimale non nulle), et supprimeraient les artefacts de fréquence cardiaque et de vitesse. Les fichiers XLSX et FIT contiendraient, comme les SML, les données brutes. On né sera donc pas surpris de constater que le temps est décrit à la milliseconde près dans les fichiers SML et GPX et à la seconde dans les fichiers TCX, KML et XLSX (avec pour ce dernier un ou plusieurs enregistrements dans la même seconde).
Conclusion
Comment conclure sans faire le parallèle entre Suunto et Nikon, d’un côté, avec de l’autre Garmin et Canon ? Les clients des premières marques citées font montre d’une confiance absolue dans leur outil et consacrent alors toute leur énergie à courir ou photographier quand les autres, doutant de leur matériel, errent de forum en forum. Certaines marques ont su inspirer confiance, et il faut leur rendre hommage : car au-delà des doutes que j’ai pu semer par ce billet je suis convaincu que cette confiance est le fruit mérité de longues années de professionnalisme de la part de Suunto ou, pour reprendre cet exemple, Nikon.